Ascensionner du Ventoux

Aujourd'hui, mû par le seul désir de voir un lieu réputé pour sa hauteur, j'ai fait l'ascension d'un mont, le plus élevé de la région, nommé non sans raison Ventoux. (...)

les 4 derniers km d'une ascension terriblement entrainante

La masse du mont, un amoncellement de rochers, est fortement escarpée et presque inacessible; mais, le poète l' a bien dit, « labeur opiniâtre vient à bout de tout ».La longue journée, la température clémente, l'enthousiasme, la vigueur, l'agilité du corps , tout favorisait notre escalade.

(...) Mais la nature ne cède pas à la volonté humaine, et il est impossible pour un corps de gagner les hauteurs en descendant (1).

(...). La vie que nous appelons heureuse occupe les hauteurs et, comme dit le proverbe, étroite est la voie qui y mène(2) Au début, surpris par cet air étrangement léger et par ce spectacle gandiose, je suis resté comme frappé de stupeur. (...)

Et je me rappelai ce passage d'Augustin : « Je veux rappeler mes turpitudes passées, mon âme corrompue par la chair"Ne vivez pas dans les festins, dans les débauches, ni dans les voluptés impudiques, ni dans la lutte ni dans l'envie.Et ne faites point de vos concupiscences ( en un seul mot, ndlr) une providence charnelle

(...) Viens, suis-moi, et tu auras un trésor dans le Ciel ». Alors, satisfait jusqu'à l'ivresse par la vue de cette montagne, je tournai les yeux de l'âme vers moi-même. Adieu »

de Malaucène(3), le 26 Avril 1336

Extrait de Familiarum Rerum Libri IV,I traduit du latin par Oliviero MontelBello

Ce Ventoux figure volontiers parmi mes fixations. Peut-être pour son caratère lunaire (surtout côté Sud). Peut-être aussi parce que quelque part j'y joue un peu à domicile. Ou peut-être parce que Eole y est particulièrement capricieux, pour ne pas dire à la fois caractériel et plus que généreux. Car pour en revenir à nos préoccupations bassement libéristes, les pilotes locaux ne disent-ils pas:

« Le Ventoux, dix fois on y monte , une fois on y vole » ?

J'ai testé pour vous : c'est pas des bourres. Et encore, à condition d'avoir quelqu'un qui se tape la rotation.. Plus tellement maintenant, après avoir apprivoisé les caprices du mistral et en acceptant de voler parfois à des heures indues.

Ceci étant, par temps clair, on ne le regrettera pas: les mirettes en prennent une bonne dose. Vue un peu lointaine certes, mais d'autant plus panoramique. C'est toute la chaîne qui défile, des contreforts du Bugey au massif du Mercantour en passant par le Mt Blanc, le Devoluy, les Champsaur, Pelvoux et autre barre des Ecrins. Je touche pas une canette en géographie et j'ai déjà des problèmes d'espace mémoire. C'est donc peut-être le tiercé dans le désordre... Mais désordre ou pas, tous ces noms sont bien gravés, tout là-haut, sur la table d'orientation.

Alors, la fois sur dix où ça décolle, et plus encore la fois sur vingt où ça décolle et où ça tient, on peut se permettre le luxe d'en profiter grassement ... Avec, soyons fou, un verre de Côtes du Ventoux si vous posez côté Sud. Ou un verre de Côteaux des Baronnies si vous vous compromettez côté Nord. Voire un verre de Beaume de Venise ou de Gigondas si vous tapez quelques kms côté Ouest, en direction des Dentelles de Montmirail, au-delà de Malaucène.
Question technique: à quand l'alcolo-Test en vente libre aux atterros ?

Le Ventoux vu par TOM Mai 1999 © Montel TOM

Le "Géants de Provence", comme l'aime à l'appeler fièrement certains locaux, n'est pas un spot de vol en tant que tel. Il n'est pas très fréquenté.
Mais s'y mettre en l'air est toujours un moment particulier, unique, mélange de zen, d'espace et de calme, sauf quand les conditions soutenues génèrent le stress.

J'odore voler là. Peut-etre parceque le vol s'y mérite. Rien qu'en rotation. Sans parler des montées hivernales se terminant à ripattons dans la neige.
Réfléchir vraiment quand on s'y met en l'air (du moins quand y'a de l'air).

Ce jour du 25-XII de l'an 1997

Que Eole soit avec vous.